On ne sait jamais trop quand les choses commencent, quand pour la première fois, on se dit je vais faire du vin. Cela doit être là, en nous, profondément ancré. Certains appellent cela le destin, la destinée, l’infini faisceau de souvenirs, d’expériences, de rencontres, d’envies qui se tissent au fil des années pour un jour nous faire prendre conscience que cela fait un moment qu’on en fait… du vin. Le cas Clavel, Pierre comme Estelle, n’y déroge pas.
Ou plutôt quand Pierre rencontre Estelle. Un moment important. Certainement un début, le début. Le couple s’installe à Saint-Bauzille-de-Montmel au nord de Montpellier. Nous sommes en 1994. Pierre, c’est le fils de Jean Clavel, l’historien du vignoble languedocien. Jean a imaginé ce que pouvait devenir les vins du Languedoc, bien avant l’essor de la région. Une vision prémonitoire qui a boosté les idées de Pierre, l’a conforté dans l’envie d’en faire. En bon autodidacte, il s’y est attelé dès 1986. Et connaît un premier succès pour la qualité de sa Copa Santa, premier millésime en 1992. Puis vient…
On se rapproche de Montpellier. À la sortie du petit village en allant vers le Pic Saint Loup gît le Mas de Perié, une opportunité, un potentiel. Tout y est, mais tout est à y faire ou refaire. Un projet surdimensionné,
on était à l’âge de faire un projet de vie, de trouver un endroit où travailler, où vivre, où élever nos enfants, aussi d’avoir un vrai projet agricole et pas seulement viticole.
Après deux années, enfin l’aboutissement, la famille Clavel s’installe dans leur nouveau cadre de vie. Les deux ans de patience ont été mis à profit, en plus du vin, Pierre a fait un peu d’élevage, Estelle a développé la partie jardin.
On n’en a pas encore parlé jusqu’ici, mais Antoine, l’aîné des deux enfants, réfléchit depuis longtemps à rejoindre ses parents. Pour son frère Martin, c’est pareil. À 26 ans le plus grand, après quelques mois passé à travailler en famille, le voilà déterminé à rester. D’un caractère plutôt réfléchi, il a déjà en tête quelques projets. La bonne humeur qui règne au sein de l’équipe, le dialogue, la définition précise du travail à accomplir, les objectifs bien définis, les ‘petits’ moyens qui y sont alloués, favorisent ses projections.
À Antoine, ça lui parle, il se sent chez lui, avec un joli terrain de jeu pour être créatif.
Martin, après des études en Bourgogne, s’est vu appelé par d’autres horizons. Les Antipodes lui ont fait découvrir comment poussait la vigne en Nouvelle-Zélande et en Australie. Plus proche, il a voulu savoir comment se comportaient les Grenache de Châteauneuf du Pape et les Syrah de Crozes-Hermitage. Intuitif, très sensible à la nature, à ce qui l’entoure, il lui faut prendre la température des choses, les expérimenter, s’en nourrir. Son périple et ses expériences lui permettent aujourd’hui, à 25 ans, d’imaginer avec assurance son avenir de vigneron.
On les sent complémentaires, Antoine méthodique, cérébral doté d’une culture du vin étonnante pour son âge couplé à une jouissance de la vie. Martin, lui, semble palper l’intangible, sa réceptivité lui permet de lire la nature, de la comprendre, de la ressentir.
Deux individualités, l’avenir du Mas de Perié…
Pour Pierre et Estelle, le Mas, c’est un engagement fort, certes personnel qui se traduit par une envie de partage, pas seulement avec la famille, l’équipe, les amis, les clients, les visiteurs, mais aussi avec tout ce qui les entourent, tout ce qui peuple et fait le décor du domaine, les oliveraies, les parties vouées à l’élevage, les prairies naturelles.
Le respect de la nature commence par le respect de soi et des gens.